Conte N°1 Extrait n°2 chapitre 1

Flora Byton et le Jeteur de sorts

Extrait n°2 Chapitre 1

(…)

– Maman, ce matin, une catastrophe s’est déroulée dans notre poulailler. Il est saccagé. On a perdu des poules, et le coq est blessé. Je t’assure que j’avais fermé le bâtiment hier.

Au lieu de la réprimander, sa mère, regarda le paysage s’étendant sous le ciel limpide. A l’horizon s’élevait la forteresse teutonique de Neidenburg.

Le vent agita la cime de la forêt de cèdres, lorsque le tonnerre gronda dans un coin du ciel noir.

– Je ressens de mauvaises ondes, déclara Marysia la voix tremblotante en observant une volée d’alouettes.

Elles restèrent silencieuses. Soudain, la femme révéla d’une voix rauque.

– Ils rodaient cette nuit, tapis dans l’ombre, en faisant leurs basses manœuvres.

– Ils ?...De qui parles-tu ?

– Je les combattrai !

– C’est qui ?

– J’ai entendu les voleurs, et je ne voulais pas réveiller ton père, continua Marysia en transe.

– Les voleurs de nos bêtes ? questionna Flora stupéfaite.

Marysia Bytom prit la main de sa fille et la serra fort.

– Regarde ce séquoia est au milieu des cèdres. C’est le seul immobile sous les plis du vent, insinua-t-elle d’une voix lugubre.

– Je ne le vois pas, énonça Flora en observant les alentours.

– Les Kudlak approchent ! Le danger est imminent, continua la femme en secouant ses membres.

– De quoi parles-tu maman ? s’alarma Flora.

– Les signes existent ! persista Marysia en tremblant.

– Lesquels ?

Un bruit résonna dans la maison en faisant sursauter Flora.

La fillette angoissée, lâcha la main de sa mère et se précipita dans le salon. (…)

– Il est déjà sept heures ! Prépare ton cartable.

– Mais tu ne m’as pas répondu.

– A propos de quoi ? questionna sa mère.

– Je te parlais des dégâts du poulailler, et des Kudlak. Qui sont-ils ? sollicita Flora à sa mère qui sans l’écouter se dirigea vers la cuisine.

La fillette n’insista pas, prit son cartable, lorsqu’elle reçut un message téléphonique :

« Flora ma douce. Tu dois veiller sur ta mère. Mes prières iront vers vous. Prends soin de toi. Je vous aime. »

– Papa pense à nous, annonça-t-elle, joyeuse à sa mère.

– Je sais ma chérie, dépêche-toi, coupa Marysia en lui donnant le sac de son déjeuner.

– Bonjour madame Bytom, intervint Jerzy Bovery en remontant l’allée.

– Flora, ton ami t’attend, débita Marysia en le saluant d’un geste lent.

(…)

Sa mère l’embrassa puis se couvrit les cheveux d’un voile noire, en ajoutant :

– Ne t’en fais pas, ma chérie, la malédiction est tenace, elle s’acharne, mais ne gagnera pas.

Elle referma la porte d’entrée.

– La malédiction, répéta sa fille déboussolée par son attitude.

Elle rejoignit son camarade, et prirent leur vélos en direction de l’école du village.

– Tu as les traits tirés, Jerzy.

– Oui, j’ai mal dormi cette nuit à cause des bruits.

– Lesquels ? émit Flora tout en pressentant la réponse.

– Les hurlements résonnaient dans la vallée.

– Tu les as entendus aussi ? Ce matin des poules mortes trainaient dans notre poulailler dévasté, révéla la fillette.

– Chez mon voisin plusieurs canards ont été dévorés. Et il ne restait que les carcasses de veaux.

– Ma mère ne semblait pas étonnée, et elle quand même parlé de Kudlak. Tu sais de quoi il s’agit ?

– Les Kudlaks sont des vampires, déclara Jerzy. C'est peu probable qu’ils agissent en hurlant toute la nuit, jugea son ami.

– Alors quels monstres se manifestent de la sorte ? s’inquiéta la fillette.

– Mes parents m’interdissent de sortir le soir. Ils ont rejoint la milice, et ne me confie rien de plus, blâma le garçon.

Son ami gêné de voir Flora se saisit d’un mouchoir énonça :

– Tu ne vas pas pleurer ?

– Que tu es bête. Regarde plutôt cela ! Elle ouvrit le tissu.

– D’où provient ce fluide ? questionna-t-il.

– Ce liquide dégoulinait dans mon enclos.

– Donne-moi le prélèvement. Je le déposerai au laboratoire du vétérinaire, le docteur Gregory.

– C’est d’accord. Attends, je vais mieux le protéger, décida Flora qui sortit de son cartable le sachet plastique dans lequel se trouvait son sandwich emballé dans un papier aluminium. Elle le rangea dans son sac, puis retourna le sachet et y plaça le mouchoir.

– Tiens, il ne risque plus de s’abîmer.

– Merci. Les résultats des analyses seront plus nettes, divulgua Jerzy.

– J’ai photographié aussi une plume gigantesque, indiqua la paysanne en faisant circuler les clichés du téléphone portable.

– Euh…, j’ai un doute, non ! Cela n’est pas possible ! s’écria le garçon troublé.

– Qu’y a-t-il ?

– S’il te plait, transfert moi tout de suite tes photos.

Flora manipula son portable.

– Tu les as reçus ?

– Oui, affirma son ami, stupéfait par les agrandissements. Euh… je

– Mais qu’est-ce qu’il y a ? s'impatienta Flora.

– Il s’agit de (…)

– Quoi ? Les monstres légendaires dont on faisait le portrait en cours de dessin la semaine dernière ? Ils n’existent pas !(…)

– Les assauts des créatures terrifiantes se justifient. Ils apparaissent pendant les nuits orageuses, en principe tous les cinquante ans. Le nouveau professeur de dessin, monsieur Cygan nous en avait parlé dans un cours sur le folklore de la région.

– Je m’en souviens. Il ne s’agissait que de mythologie, continua Flora. Ces horribles monstres effectuent des massacres.

Tétanisés par leurs découvertes, les enfants se turent.

Au bout d’un moment, Jerzy reprit :

– Je dois agir. Il faut que j’en capture un !

– Mais tu es complément fou ! réagit Flora abasourdit. Comment les approcheras-tu ?

(…)

– Il y a des traces plus petites que d’autres d’un mètre, aux lieux de trois.

– Alors ?

– Il s’agit de bébés (…) Je vais placer des pièges, dès ce soir dans ma ferme. J’en coincerai un comme un rat !

– C’est irréalisable.

– Dans trois jours une tempête est annoncée, ajouta Jerzy déterminé en regardant la météo de son téléphone.

Flora consulta son portable, et lui envoya des photographies.

Jerzy tressaillit.

– Bon sang, regarde ces traces (…). C’est un mauvais présage. Ceux-là mutent, confirma-t-il.

– Comment ?

(...)

– Ils ont aussi saccagé notre étable hier soir.

– Que feras-tu de celui que tu captureras ?

– Je le dépècerai et le ferai cuire (…)

– Tu racontes des bêtises ! (…). Tu n’as ni le droit de le tuer, ni de le manger, conclut Flora.

– Je me gênerai pas ! S’ils s’en prennent aux animaux, ils vont bientôt attaquer des humains.

Il continua excédé :

– Les miliciens sont d’ailleurs formels. On a déjà perdu plusieurs bêtes en deux semaines, sans compter ceux des voisins. Mes tantes et oncles sont tous paysans, ils n’ont pas des métiers comme les tiens, dévoila le garçon.

Piquée au vif, Flora ne dit mot. Sa famille possédait peu d’animaux par rapport à celle de son entourage aux troupeaux imposants.

Ainsi, la fillette évita de froisser son ami.

Publication 20 juin 2023